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29 juin 2012

VDVs #47 : Accords Vins-Mets au restaurant "La Buvette" à Bruxelles

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Vendredis du Vin  #47
Accords Vins-Mets….
Défiez votre chef favori !
 

A la fin de son vénérable ouvrage de compilation des œuvres littéraires sur la syrah, Le Président Doc Adn alias surtout Aurélien Litron invitait le gentil peuple du Glou à migrer pour le mois de juin vers le nouveau thème des très joyeux Vendredis du Vin Opus 47 en Glou et Miam Majeur dont l’auteur de ces lignes est censé tenter d’assurer aussi  bien que son noble prédécesseur, l’éphémère présidence… 

Mais là où il fallut que je m’insurge …  c’est que l’individu Litron invitait le gentil peuple du glou à une séance d’accords Mets-Vins, alors que tout au contraire, il s‘agit bien d’une séance d‘accords VINS-METS !!!! 

Juste une volonté de jouer sur les mots ? Que nenni ! 

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Dessin de
Rémy Bousquet 

Car il s’agit bien d’un « défi » qui a été lancé aux chefs de la francophonie par les glouglouteurs vendredivinesques.  Et ce défi, c’est de mettre le chef en contact suffisamment longtemps à l’avance avec un ou plusieurs vins qu’il ne connaît pas ou pas forcément et qu’après y avoir gouté goulument, il nous sorte le ou les plats qui vont le mieux avec cette sélection, occasion faite évidemment de partager tout cela autour de sa table….
Evidemment, pour y arriver, il faut au moins deux exemplaires de chaque quille, une qu’on offre au chef du jour pour qu’il se fasse le gosier, une qu’on boit le jour de la divine cène.

Bien sûr, conscient que la chose n’est probablement pas réalisable telle quelle pour tout le monde, faute de combattants, faute de munitions ou faute de budget, on pouvait aussi imaginer d’autres stratagèmes allant dans le sens de ce défi Vins-Mets. Comme le suggérait le jeune Olivier, fidèle lecteur de Pontarlier en Jura, pourquoi ne pas prendre un ou plusieurs vins de la carte d’un resto, en avertir son chef un peu à l’avance, afin qu’il concocte un ou plusieurs plats à l’idéal de cette sélection…. ou alors, faute de pouvoir le faire au resto, au vrai, pourquoi ne pas le faire avec votre chef préféré, tendre moitié ou ami aux mains d’argent et à la fourchette d’or….
Finalement, tout était possible, à tous les budgets tant que demeurait l’esprit du défi initial « Goûtes-moi ces vins, et fais-nous une cuisine magique dessus ! »….
  

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Dessin de Rémy Bousquet 

Pour nous, les «Vendredis du Vin Brusseleirs »,  le principe initial a fonctionné à merveille… mais tout le monde dans la galaxie sait désormais que je suis entouré d’une fameuse bande de joyeux lurons (certains disent fous furieux) et que les restos qui sortent de l’ordinaire, ça ne manque pas en « Capitale ». 

Il fallait donc avant tout choisir un chef puis sélectionner des bouteilles, avant de festivement goûter les accords suggérés ... 

1. Le choix du chef : 

Nous avons proposé notre « défi » à Nicolas Scheidt, chef très en vue de « La Buvette » à Saint-Gilles (Bruxelles).

 

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Malgré ses origines alsaciennes, Nicolas a très vite montré une envie de bouger. On le retrouve d’bord en Angleterre aux côtés de Jamie Oliver, puis à Paris, où il fait déjà bien parler de lui comme chef de l’Office, une enseigne trendy de la Ville Lumière mais qui ne lui laissait pas assez les mains libres en termes de créativité. 

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Pour complètement pouvoir s’exprimer, il décide de tenter l’aventure à Bruxelles en assurant le relais au « Café des Spores », de Philippe Emmanuelli , tout en développant  le concept de la « Buvette », restaurant de bistronomie situé dans la même rue, juste en face, dans une ancienne boucherie chevaline « Art Nouveau » désormais classée.

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Rapidement, il va laisser l’équipe du Café des Spores évoluer à son rythme, se concentrant de développer une cuisine du marché proche de l’esprit table d’hôte. Tout comme son compatriote Nicolas Darnauguillhem du « Neptune », Nicolas Scheidt va largement titiller les standards de la créativité gastronomique pour proposer  une cuisine inspirée, inventive, variée, faisant une large place au produit et aux vins de haute buvabilité, le bio « nature » étant omniprésent à la carte.
Les 24 places à table sont désormais toujours réservées, d’autant qu’à la qualité vient s’ajouter les prix, Nicolas n’hésitant pas le soir à proposer un menu 7 plats à…. 45 euros !
Bref vous l’avez compris, même si d’autres talents bruxellois auraient certainement aussi bien tiré leur plan avec ce défi, notre choix s’imposait presque comme une évidence !

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Nicolas Scheidt
LA BUVETTE
108, Chaussée d’Alsemberg
1060 Saint-Gilles
TEL: +32 2 534 13 03
www.la-buvette.be  

2. Le choix des vins 

C’est sûr, on a voulu faire les choses à donf… Le chef idéal étant trouvé, il fallait sélectionner une belle liste de vins parce que le chef, pour l’occasion nous annonçait un menu en 10 étapes. Sans vouloir pour autant chasser l’étiquette, il était dans l’air que pour faire honneur à la cuisine, ça sentait les « coups de cœur » côté quilles, le tout au prix d’un vote où chacun des onze gentils membres des VDVs devaient choisir 12 vins, parmi une liste de 66 bouteilles, cette liste émanant elle-même des suggestions des dits membres. 

Le choix final du jury se porta ainsi sur les vins suivants :

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Francis Boulard - Petraea 2007 

Dans la catégorie « bulles », l’ami Francis a été le « tsunami » de la sélection, obtenant une unanimité des voix pour sa médiatique cuvée Petraea. Car oui, bien sûr, et même s’il s’en défendra sûrement, le malicieux champenois affole beaucoup de chroniques avec cette cuvée ou encore avec les « Rachais », alors que le reste de sa production est aussi tenu en grande estime. Pourtant la bestiole est vraiment à ranger du côté des « spirituels sensibles », et c’est probablement, au-delà de la pureté et de la tension, cette grande sensibilité qui fait l’attrait de ses vins. Et comme en plus, sa fille Delphine y ajoute ses notes de charme féminin, on n’est jamais loin du paradis avec ces bulles-là.

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Thomas Pico - Chablis Pattes-Loup 2010 

Si Thomas Pico ne peut pas revendiquer le « gabarit » de Francis, il n’a aucunement à en envier le succès, tant ses Chablis déboulent comme un vrai raz de marée sur les meilleures cartes et les meilleurs tarifs. Parvenant systématiquement à allier le fruit à la pureté avec des fraicheurs souvent déconcertantes, atteignant le plus souvent des sommets de salinité, Thomas n’est pas loin de devenir le porte-drapeau des Chablis naturels. On se réjouira de voir ses parcelles s’agrandir tant la production très limitée était en opposition avec l’énorme demande.

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André Ostertag - Riesling Grand Cru Muenchberg 2008 

Si vous dites à André Ostertag que vous l’admirez comme vigneron, ne faites jamais la restriction du Bas-Rhin (si restriction, il y a), car il est clair que c’est bien de toute l’Alsace qu’André est un dominateur. Au respect de ses sols, il combine un travail quasi magique à la cave pour nous sortir des vins de soifs juteux et des vins de pierre qui allient des salinités angulaires à des finesses incomparables. A toutes ces qualités, il faut encore ajouter celle d’une des plus belles plumes de sa génération qui en font un artiste pur et entier. Ce qu’il parvient à sortir du Grand Cru Muenchberg sur ses pinots gris ou ses rieslings force l’admiration. 

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Domaine du Collier - Saumur blanc 2008 

Dans la famille Foucault donnez-moi le fils (et le neveu), car c’est bien cette filiation qui le lie aux ténors d’un certain Clos Rougeard à Saumur. Mais filiation ne veut pas dire copier/coller… au contraire, car c’est clairement la voie bio et le « naturel » à la cave qu’Antoine Foucault a choisi pour ses vins. Sans perdre en minéralité, ses blancs sont souvent somptueusement arrondis par un miel jamais excessif, tendus par une acidité cristalline, avec pour résultat de très vives émotions.
Indéniablement, le domaine d’Antoine Foucault et de sa compagne Caroline a fait son « chenin » depuis sa création en 1999.

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Domaine Overnoy - Savagnin Ouillé 2005 

Parler de Pierre Overnoy et de son successeur, Emmanuel Houillon, cela s’apparente, pour nous pauvres mortels, à titiller des Titans des vins sans soufre. Car faire appel ainsi à l’Olympe n’étonnera personne, tant chaque microcuvée de ce petit domaine à Pupillin fait l’objet de mythe chez les adorateurs des vins de glou et tant, avec Marcel Lapierre, le nom de Pierre Overnoy brille au firmament des vins purs. Et ce Savagnin 2005 ne devrait pas s’éloigner de l’idéal lui qui a connu pendant plus de 5 ans d’élevage, l’attentif ouillage de ses maîtres.

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Louis-Antoine Luyt - Clos Ouvert « Camernère » 2009 

Après une formation chez Marcel Lapierre, Louis-Antoine Luyt s’en va en 2006 chercher l’aventure chilienne. Suite à un terrible tremblement de terre en 2010 où il manque de tout perdre à commencer par sa vie, il parvient à faire renaître son domaine du « Clos Ouvert » grâce à un grand élan de solidarité. Lui, qui prônait des vins les plus naturels possible à son arrivée au Chili, il ressort de cette histoire encore plus radical que jamais  de cette terrible histoire…. Et avec des vins tous plus magnifiques les uns que les autres. Depuis son passage à la Dive Bouteille en 2012, son nom est sur toutes les lèvres... Pas étonnant quand on met les lèvres  entre autres à ce Camernère, cousin du Cabernet franc et cépage emblématique du Chili.

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L’Anglore - VDT Cuvée des Traverses 2010 

Petit domaine entre Uzès et Avignon, l’Anglore  et son maître à penser Eric Pfifferling font l’objet de référence en termes de vin naturel dans la région de Tavel. Est-ce son passé d’apiculteur qui a amené Eric Pfifferling à tant de respect du caractère naturel de ses vins, toujours est-il que le bonhomme bichonne ses vignes et ses vins en tentant d’intervenir le moins possible en évitant par exemple les filtrations et le pompage. Le résultat : des vins savoureux de fruit et de fraicheur comme cette cuvée « Les Traverses » à base de 70 % de syrah et 30% de grenache sur un plateau argilo-calcaire balayé par les vents.

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Jean-François Ganevat - Côtes du Jura rouge « Julien » Pinot Noir 2010 

Jean-François Ganevat, c’est avant tout un nom « Fanfan » qui fait aujourd’hui briller tant de regards rien qu’à l’appel de son nom que cela soit par la qualité de ses vins ou son côté pour le moins festif. Cette « Gueule » de Rotalier en Jura est devenue un véritable Pape des vins naturels en Jura, malgré qu’il ne revendique  strictement rien. il n’a pas d’équivalent pour proposer un nombre élevé de cuvées parcellaires toutes aussi précises, tendues et juteuses. Loin de s’arrêter au chardonnay et au savagnin, il se plaît à faire revivre des cépages comme l’enfariné. Quand il touche au pinot noir comme dans cette cuvée « Julien », c’est souvent magique.

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Ormiale - Bordeaux rouge 2009 

Vous avez dit Ormiale ? Certes… ce tout petit domaine de l’Entre Deux Mers n’est pas encore à la une de toute la sphère glou. Mais un jour, on en est sûrs… parce qu’il y a chez Fabrice Domercq, presque belge d’adoption, et Jasper Morrison, le designer réputé, une incroyable volonté de faire un vin pur, plein, respectueux du terroir, limitant au maximum les interventions à la vigne et à la cave, en fait, un véritable modèle que l’on rencontre trop rarement en Bordelais. Malgré la jeunesse des vignes, les vins se sont avérés étonnamment juteux dès les tous premiers millésimes. On y retrouve toute la sensibilité de Fabrice qui est un peu notre « vigneron à nous » aux Vendredis du Vin Brusseleirs.  La cuvée 2009 est la dernière à proposer du merlot en monocépage.

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Foradori - Teroldego Rotaliano 2008 

Souvent l’Italie est belle et souvent elle l’est à travers ses vins, probablement parce que les vins y sont plus liés à la table, à la vie qu’ailleurs. Presque toujours, quand il s’agit d’une vigneronne, ce caractère est amplifié. Mais quand vous êtes en Italie et prononcez le nom d’Elisabetta Foradori, on vous répondra systématiquement : « Ah Elisabetta… Che Bella ! ». Tout est dit. J’en connais qui ont craqué en deux minutes… Pourquoi ? Parce que rarement on a retrouvé autant de cohérence, de recherche de symbiose, de simplicité et de sensibilité qu’entre une personne, ses terres et ses vins : la beauté à l’état pur, « natif ». Il n’y a qu’à prier que les fidèles soient des légions à la suivre, rien qu’en faisant renaitre des cépages ancestraux tels ce Teroldego.

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Campi di Fonterenza - Rosso di Montalcino 2008 

Au cœur de leur domaine, Campi di Fonterenza sur les hauteurs de Montalcino, il y a les jumelles Padovani, Francesca et Margherita, encore des êtres humains « à part ». Certes elles ont la fougue de la jeunesse, certes elles ont des modèles comme Elisabetta Foradori ou Giovanna Morganti, certes elles se démarquent de leurs voisins conservateurs par une volonté réelle de travailler en bio à la vigne et le plus naturellement possible à la cave, mais ce qui prime avant tout chez elles, c’est la recherche de l’émotion à travers leurs vins, cette émotion qui vous traverse le corps, qu’on ressent jusqu’au plus profond des tripes. Rien d’étonnant de voir leurs vins décrocher des tas de coups de cœur lors de dégustation à l’aveugle, rarement le fruit a donné autant de plaisir sur le Sangiovese Grosso.

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Domaine Valette - Clos Reyssié 2003 

Est-ce la proximité du Beaujolais, mais à Chaintré, Philippe Valette a été un des pionniers bourguignons à allier culture biologique (dès 1992) à un travail d’intrants et de manipulations minimisés à la cave. N’hésitant pas à faire des élevages très longs, et ne se refusant pas à produire des cuvées non ouillées, il a l’art de produire des vins pleins de caractère, pleins de minéralité mais toujours d’une énorme buvabilité. Issue de très vieilles vignes (70 ans) sur un sol argilocalcaire, le Clos Reyssié a muri sur ses lies 36 mois en futs pour aboutir à un vin riche, opulent mais d’une étonnante fraicheur pour son millésime.

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Domaine André Boxler - Riesling GC Sommerberg "D" VT 2005 

On ne présente plus Jean Boxler aux fans des rieslings minéraux et tendus. Prenant la suite d’un énorme de gain de qualité opéré par son père, Jean Boxler a littéralement transcendé ses granits ultra pentus du Sommerberg pour en faire des vins d’une pureté rare, d’une minéralité formidable, même dans les millésimes les plus solaires. Sensible, passionné, angoissé parfois, il recherche en permanence de grands équilibres. Avec ce millésime 2005 qui a tant donné aux vignerons, il prouve comment une VT peut s’avérer être cristalline, à des années lumières des lourdeurs qu’on nous fait parfois déguster…. Quand un grand vigneron s’attaque à un grand cépage… 

3. Les accords proposés : 

Après un mois d’intense réflexion où il eut l’occasion de goûter chacune de ces bouteilles, Nicolas nous a suggéré le menu en 10 plats et les accords suivants  

Duos Apéritifs : Abricot/Amande, Betterave/Myrtille
Francis Boulard - Petraea 2007

Romaine farcie a la ricotta, chou rave
Thomas Pico - Chablis Pattes-Loup 2010

Maquereau, coques, foie de lotte pommes de terre
André Ostertag - Riesling Grand Cru Muenchberg 2008

Veau pressé, oignons confits, fleurs de bourrache
Domaine du Collier - Saumur blanc 2008

Bouillon aux cèpes,  moelle et salicornes
Domaine Overnoy - Savagnin Ouillé 2005

Cabillaud confit au beurre noisette, jus de volaille
Louis-Antoine Luyt - Clos Ouvert « Camernère » 2009
 L’Anglore (Eric Pfifferling) - VDT Cuvée des Traverses 2010

Canette fumée, aubergine au miso
Jean-François Ganevat - Côtes du Jura rouge « Julien » Pinot Noir
Ormiale 2009
 

Pomme pochée, génoise, basilic
Foradori - Teroldego Rotaliano 2008
Campi di Fonterenza - Rosso di Montalcino 2008

Custard Tart
Domaine Valette - Clos Reyssié 2003

Parfait glacé à la rhubarbe
Domaine André Boxler - Riesling GC Sommerberg "D" VT 2005

Il ne nous restait plus que de nous réunir ce  vendredi 22 juin 2012, à la Buvette pour tâter  la chose !

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Dessin de Rémy Bousquet 

4. Le repas 

Nous étions 18 convives, amis et compagnes ayant décidés de se joindre à la bande, le tout permettant à Nicolas Scheidt de nous réserver l’entièreté de son restaurant.

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Tous les vins ont été goûtés seuls avant d’être ensuite associés au plats. 

Duos Apéritifs : Abricot/Amande, Betterave/Myrtille
Francis Boulard - Petraea 2007 

Il a fallu quelques 4 bouteilles du Nectar de Francis pour lancer les festivités.  Les deux premières, servies seules à l’accueil des convives ont démontré combien « Le Grognard » du Nord sait réaliser un des plus beaux vins de l’appellation, long, vineux, salin et surtout d’une tension magique.

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On reste dans la magie avec le premier accord sur le duo Abricot/Amande avec le vin qui réussit à faire exploser le fruit en bouche, lui conférant une fraicheur inégalable. Francis, si tu nous lis….

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Malgré le côté frais de la myrtille et les fleurs de roquette qui apporte un indéniable plaisir aux yeux, l’accord est un peu moins magique  du fait que la betterave apporte un gras qui n’est pas autant compensé que ne le fut celui de l’amande. 

Romaine farcie a la ricotta, chou rave
Thomas Pico - Chablis Pattes-Loup 2010 

Dopé par la fraicheur de son millésime, le Chablis de Thomas propose un fruit juteux, terriblement rafraichissant, la minéralité anisée inhérente à ce vin ajoutant encore à son caractère pur. Un must !

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La feuille de Romaine farcie à la Ricotta démontre comment à partir d’ingrédients classiques, on peut faire une véritable tuerie, d’autant que le chou rave et le petit jus sont parfaits pour donner du croquant et relever l’ensemble. 

Le Chablis apporte encore de la fraicheur et surtout un côté citrique qui fait joyeusement vibrer le plat. Comme le vin n’est pas dépourvu de gras, la fusion avec la ricotta est parfaite. Bref, vous l’avez compris, un accord d’école, à mon humble avis. 

Maquereau, foie de lotte, coques, pommes de terre
André Ostertag - Riesling Grand Cru Muenchberg 2008 

Je pense que le Muenchberg 2008 d’André Ostertag est un des vins que j’ai le plus commenté sur mon blog, il est aussi un des trois plus beaux rieslings de ce millésime que nous avions goûté pourtant parmi 144 concurrents l’été précédent. Alors il parait un peu superlatif de revenir  encore avec des gerbes de fleurs…. Et pourtant, il faut le souligner ce nez exceptionnel, encore très primaire, mais fusionné et d’une pureté remarquable, laissant transparaître de fines, très fines notes exotiques et un floral éblouissant. Et il faut la signaler cette minéralité qui est emballée par la pureté de l’acidité et qui vous fait le tour du monde du palais. Respect !

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Sur un tel trésor alsacien, de la part d’un alsacien en Belgique, pour un presque belge fou d’Alsace, il y avait comme un parfum d’exception dans l’air. Le plat de Nicolas est indéniablement la meilleure entrée que j’ai mangée depuis des mois, si pas des années. Sur papier, on aurait presque peur, du moins les personnes qui n’ont pas le goût du risque. Mais réussir à allier la suavité, la fraicheur d’un poisson comme le maquereau, bien plus noble qu’il ne se fait dire, et la puissance du foie de la lotte, alors là, chapeau. En fait, pour comprendre, il faut l’avoir en bouche et surtout ne pas hésiter à fusionner chacun des ingrédients…. TUERIE totale 

Et pour ceux qui auraient encore un doute sur la puissance et le gras du foie, inutile de dire que le tranchant du riesling met les pendules à l’heure, en plus d’ajouter, de faire sublimer les notes iodées de l’ensemble. On reste sur du fusionnel, entre deux grands caractères, pour sûr, les esthètes vous diront que deux géants pareils se dégustent seuls, rien que pour eux…. Pour sûr, mais certainement pas pour moi. 

Veau pressé, oignons confits, fleurs de bourrache
Domaine du Collier - Saumur blanc 2008 

D’une part, il y a le Domaine du Collier. La quille, on vous l’impose pas mal depuis un an, normal, c’est un must… ce truc. Tout en puissance, aussi, le truc, mais quand il s’agit de distiller un aussi beau miel et surtout un pareil floral, chez Fragonard, ils s’arrachent déjà les cheveux de jalousie. Puissance aussi dans l’acidité, ce qui tombe particulièrement à pic parce que le fruit et le gras sont aussi là en fanfare. Puissance enfin, dans la longueur, dans le jus ! Et en plus, on ne peut pas dire que l’ensemble manque de finesse….. Forza Chenin !

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De l’autre côté, il y a ce veau pressé servi tiède. Un bel ensemble, surtout du fait que l’oignon confit et la bourrache donnent de l’épice et de la fraicheur à une viande assez neutre et dont le gras ne séduit pas tout le monde, sans pour autant que cela paraisse lourdaud. 

Heureusement, il y a Zorro Chenin qui passe par là. Senderens a eu beau expliquer pendant plus de trente ans qu’un accord en opposition pouvait être bien plus intéressant qu’un riesling sur une sole au…. Riesling…. On ne capte pas toujours vraiment. Et là, certains seraient tentés de dire z’êtes pas un peu malade, non ? En fait ce plat avait littéralement besoin d’exploser, de rebondir, et le cocktail tension florale y arrive à merveille, les notes mielleuses venant s’entremêler joyeusement avec le gras du veau. Fallait oser, fallait se douter qu’il y aurait de la controverse aussi, là-dessus, mais sans controverse, on s’ennuie, un peu comme quand on regarde l’équipe de France…. de foot.
Un petit plus, aussi pour les fleurs de bourrache (qui en plus sont bonnes pour la toux).
 

Bouillon aux cèpes,  moelle et salicorne
Domaine Overnoy - Savagnin Ouillé 2005 

Changement de cap avec ce vin par rapport au précédent Chenin. Ce Savagnin s’exprime sur des notes superbement aériennes, vivantes, profondes, d’une grande complexité. On retrouve cette forte impression de fine complexité en bouche, malgré une tension encore au couteau et une salinité saillante. Bref, un véritable petit bijou de profondeur qui force l’admiration.

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Du bouillon, de la moelle, on pourrait penser que l’on risque de côtoyer  un peu trop le gras…. Il n’en est évidemment rien. Le jus est en fait parfait, presque frais et les petites boulettes finalement très fermes, croquantes respirent de vivacité grâce à un savant dosage d’épices. Quant aux cèpes, ils imprègnent le jus de leur finesse…. On n’en aurait pas douté quand on est « jumelé » au Café des Spores. Encore un plat qui m’a fait douter… dans l’énoncé, uniquement dans l’énoncé, le reste est d’une rare perfection. 

Et puis, il y a l’accord….. totalement exceptionnel, immédiat, presque ton sur ton encore qu’avec le vin, la fraicheur de l’ensemble est augmentée. On n’aurait presque rien à dire, tellement, ça parait évident ! Et pourtant, sur un bouillon vous auriez osé… du vin ? 

Cabillaud confit au beurre noisette, jus de volaille
Louis-Antoine Luyt - Clos Ouvert « Camernère » 2009
 L’Anglore (Eric Pfifferling) - VDT Cuvée des Traverses 2010
 

Le Camernère s’avère puissant, terriblement puissant à la fois au nez  où l’on frise le monolithique et surtout en bouche ou la structure est très dense. Pas que le vin soit déséquilibré pour autant, pas qu’il manque de fruit, au contraire. Mais la filiation indéniable avec le cabernet franc allié à cette puissance structurelle fait directement penser à une belle pièce charolaise, bien grillée. Avec le poisson…. On a peur….

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La Cuvée des Traverses, au contraire, montre d’emblée combien un vin du Sud peut être empreint d’élégance, de finesse tant au nez qu’en bouche. Clairement axé fruit, ce vin évite cependant tous les pièges d’un vin trop sur le jus gouleyant sans vinosité, sa précision et sa  trame minérale se chargeant de nous mettre à genoux. Un tout grand vin de Monsieur Pfifferling, hélas…. Trop rare !

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Lové dans son nid de mousseline, le cabillaud du chef se présente tout en simplicité. Sa cuisson basse température aussi le présente tout en simplicité, tout en fermeté aussi, le beurre apportant la rondeur nécessaire. On apprécie particulièrement le jus de volaille qui vient subtilement rehausser ce plat, assez classique toutefois. 

Là où les choses se corsent un peu, c’est avec les vins. Le Camernère s’avère totalement impossible à marier avec ce plat, tuant la finesse du poisson par sa structure tannique et la puissance de ses arômes. Par contre, la Cuvée des Traverses de l’Anglore est nettement plus intéressante. Elle a suffisamment de finesse, de pureté aromatique pour ne rien écraser mais au contraire pour donner de  la structure au plat, le jus faisant bien office de chainon manquant. Tout le monde ne sera jamais persuadé sur le placement d’un rouge sur un poisson, mais ce second accord ne peut vraiment être critiqué. Personnellement, j’apprécie beaucoup. 

Canette fumée, aubergine au miso
Jean-François Ganevat - Côtes du Jura rouge « Julien » Pinot Noir
Ormiale 2009
 

Qui aime bien, châtie bien, dit le proverbe, et souvent les vieux proverbes sont…. Proverbiaux. Bref, d’emblée, tant j’ai adoré ce Pinot Noir en dégustation, il y a 6 mois, tant je n’ai retrouvé ici qu’un vin maigre à l’acidité décalée, beaucoup trop dilué, manquant absolument de chair. Très bizarre, mais unanimité de mes congénères pour qui, pourtant, le nom de Ganevat est plus délicieux à entendre qu’un chant de sirène. A revoir, évidemment.

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En opposition, le merlot de cet Ormiale 2009, propose énormément de finesse au nez, de souplesse en bouche, avec les tanins justement balancés pour imprimer du relief, ainsi qu’une acidité réglée au métronome. La finale est ronde, juteuse, on se met à rêver que tous les Bordeaux pourraient être aussi heureux au palais. Pour le fun, Fabrice Domercq, membre de notre joyeuse confrérie bruxelloise mais surtout géniteur de ce flacon, nous a apporté la version non filtrée qui nous enchante encore plus par son volume tout en précision. Ormiale, un nom indéniablement à suivre.

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La canette nous est proposée en mode simplicité absolue, avec une cuisson parfaite, encore légèrement rosée. On sent littéralement la fraicheur du produit, tout en légèreté, tout en appel, aussi d’un accord avec l’autre jus, celui de la treille. 

Et là, il n’y a pas photo, le Ganevat n’arrive absolument pas à se mettre au niveau du plat, son acidité étant presque perturbante. Alors que la structure veloutée de l’Ormiale, juste rehaussée par ses tanins au relief parfait est, elle, un incontournable complément d’un plat qui n’attendait que cela. Très belle vista du Chef sur ce jeu-là, tenant compte que dans le match que se livraient les deux vins sur l’accord, il était presque impossible de faire coup double. C’était aussi un peu notre volonté, en proposant des vins en telle opposition. 

Pomme pochée, génoise, basilic
Foradori - Teroldego Rotaliano 2008
Campi di Fonterenza - Rosso di Montalcino 2008
 

Le Rosso di Montalcino s’exprime tout en puissance, un peu comme le Camernère de Luydt. On retrouve la très belle aromatique souvent commentée sur le Rosso du même domaine en 2009, très sur le fruit, juteuse même. En bouche, si on garde toujours beaucoup de fruit, les tanins et la structure générale s’avèrent plus serrés, plus secs que pour le 2009, ce qui confère un aspect assez massif au vin. Toutefois, l’ensemble ne manque ni de fraicheur (l’acidité reste très marquée), ni d’équilibre, ni de plaisir global.

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Plus au nord de la Botte, il y a le Trentino ou le territoire d’Elisabetta Foradori. Avec cette cuvée Foradori 2008, pourtant sa cuvée de base, la princesse du Teroldego réalise un sans-faute absolu, une pure merveille de délicatesse et de plaisir, avec une débauche de fruits rouges, tout en s’appuyant sur une vraie bonne structure. Il y a dans ce vin un velouté imparable et parallèlement une très grosse minéralité, véritable réussite pour un cépage normalement assez productif. Un must !

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Je ne sais pas vraiment comment nommer ce type de plat parce qu’il n’est ni dessert, ni plat classique. En fait, il s’inscrit clairement dans la liaison entre ce qui a précédé et les desserts qui suivront, et le plus souvent, ce qui est devenu une des spécialités de Nicolas Scheidt est particulièrement réussi. Bien qu’un peu disparate à aborder par sa composition (pomme pochée, génoise au pain d’épice, crème marquée par le basilic), l’ensemble est à nouveau magique, frais et gourmand à la fois, absolument pas trop axé sur le sucre. Ce qui est aussi remarquable, c’est que, marque de fabrique des lieux, on est sur un travail réel mais terriblement axé sur la simplicité. 

En fait, ce plat permet à mon humble avis un nombre hallucinant d’accords, et si le Sangiovese Grosso de Montalcino est trop structuré, trop puissant et un peu trop vif pour ce plat qui ne demande qu’à fusionner, avec le Foradori, on est dans l’accord parfait, avec, en particulier, une fusion des deux structures veloutées tout simplement renversante. A essayer sans le moindre doute ! 

Custard Tart
Domaine Valette - Clos Reyssié 2003 

Le Clos Reyssié s’inscrit clairement dans la veine des vins oxydatifs. Déjà sa robe or légèrement terni ne ment pas. Au nez, derrière une oxydation classique mais pas débordante, se cache une énorme complexité avec des fruits secs, des épices et de belles notes d’écorce d’agrume. La bouche est noble, racée, dense, minérale, encore pleine de fraicheur malgré le millésime. On y retrouve aussi ce côté sec des grands sherries. Un véritable vin de méditation.

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La Custard Tart (flan pâtissier) s’exprime tout en légèreté, presque crémeuse, tout en simplicité, à nouveau, avec un délicieux rappel d’épices sur la noix de muscade. Ces notes épicées fusionnent à merveille avec les épices du Clos Reyssié, alors que le crémeux du flan donne une structure plus ronde au côté oxydatif très sec  du vin. Un mariage parfait. 

Parfait glacé à la rhubarbe
Domaine André Boxler - Riesling GC Sommerberg "D" VT 2005 

Brillant à la robe, envoutant au nez entre ces notes d’agrumes confites, légèrement exotiques, mais aussi son floral et quelques touches d’hydrocarbures nobles, ce vin accroche avant même qu’il ne soit porté à la bouche, surtout que jamais une sensation de lourdeur ne se fasse jour. En bouche, le terroir parle. Face à la sucrosité indéniable, au confit du fruit, l’acidité tranche, la pierre parle, pas à un moment, on a l’impression de ne fut-ce que caresser l’écœurement. En fait, tout confère dans ce vin à une énorme buvabilité pleine de gourmandise.

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Le parfait glacé est lui aussi, comme la Custart Tart, d’une grande légèreté, bien plus marqué par la rhubarbe dans son côté végétal frais et plein de suc que dans sa sucrosité. Même la meringue n’impose pas son sucre. Ce qui est assez heureux en fait, parce que tout le monde n’est pas obligatoirement prêt, après 9 plats à attaquer une 2e dessert.
Avec le vin, on réussit à ne pas surcharger sucre sur sucre, probablement grâce à la précision de l’acidité du vin. Par contre le mariage entre les le confit du fruit du vin et la rhubarbe n’est pas un optimum absolu.

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Et en conclusion…. 

C’était loin d’être facile de relever le défi d’une bande de joyeux soiffards qui voulaient marquer le coup, d’une débauche gastronomique, un défi d’accord Mets-Vins qui marquait le premier anniversaire de leurs ébats viniques. Le chef n’ignorait pas que les flacons seraient nombreux, et que vu nos goûts quelquefois extrêmes (assez proches des siens, toutefois), il faudrait redoubler d’ingéniosité pour trouver les meilleurs accords. Même s’il était impossible de satisfaire tout le monde sur un menu en 10 étapes où en plus, on est jugé sans compassion (surtout par les filles), Nicolas Scheidt a vraiment fait merveille ce soir dans sa Buvette. Les recettes de cette réussite sont indéniablement de la simplicité, à des années lumières de ce qu’on voit dans les primes télévisés, une orientation complètement « marché du matin » dans le choix des produits sans refuser quelque touche d’exotisme, une réelle volonté de toujours travailler dans la fraicheur et encore une véritable discipline dans la stratégie de service, pas un temps mort, ce qui nous a éviter de sortir au milieu de la nuit.

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A ce niveau-là, je ne suis pas certain que Nicolas ait son égal à Bruxelles, parce qu’ici, la gastronomie s’appelle réellement de l’art. Rarement, très rarement autant de vins ont été à ce point mis en résonance par des plats, sans que ces plats ne soient jamais ou presque écrasés.
On a causé aussi énormément, passionnellement souvent, mais toujours de ce qui se trouvait dans nos assiettes et dans nos verres…. Exclusivement même…. C’est tout dire !
 

Merci Monsieur Nicolas Scheidt !!!

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Commentaires
C
Tres beaux plats, tres beaux vins, de la gourmandise et du risque et un tres beau CR par la dessus. Voila qui meriterait une re-election !
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P
Superbe adresse, superbes commentaires.<br /> <br /> Je ne dirais qu'une chose (comme votre Dick):<br /> <br /> "Bruxelles attends moi, j'arrive..."
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I
Un grand bravo! Époustouflant! Une adresse à retenir ( je la confie ç mes amis des Vignes de Léo)<br /> <br /> Merci de ce compte-rendu qui en dit long sur votre passion et le bonheur du partage.
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